Et le compostage, on le met aussi en partage ?
Incontournable pour tout jardinier bio bien averti, le compost est essentiel pour le soin à la terre et la régénération d’un sol vivant.
Mais il n’est pas que ça ! Le compostage en partage, c’est aussi une affaire de solidarité et d’écologie : réduire nos déchets et nous associer pour les valoriser en « Or Noir », si utile ensuite dans nos potagers.
D’une façon naturelle, dans les jardins solidaires, les adhérents installent des composteurs, souvent en autoconstruction (ah ! la récup de palettes, quelle ressource !), prennent l’habitude de ramener leurs épluchures de leurs foyers, apprennent à valoriser les herbes et les restes de leurs plantations (si vilainement appelés « déchets verts »), et gèrent en collectif la gestion de leur compost.
Et bien sûr, l’utilisent ensuite sur leurs planches de légumes. Et du coup, difficile d’en avoir suffisamment, selon la saison.
Quand on pense à tous les biodéchets qui partent dans le circuit des ordures ménagères (en général, 30% de nos poubelles peuvent aller au compost), quel dommage ! Il est l’heure d’organiser ce circuit merveilleux, ce cercle vertueux « de l’assiette à l’assiette » : légume – épluchure – compost – terre – légume…
La station des Cerises : une première expérience, un exemple à suivre
Au Jardin des Cerises, après la mise en place des parcelles individuelles pour nos jardiniers, puis du jardin pédagogique pour les petits élèves et les grands stagiaires, a été créée en septembre 2009 une station de compostage de quartier. Ce projet propose à tous les habitants de trier leurs déchets de cuisine et de les déposer dans des points de collecte répartis au pied des immeubles.
Les associations GESPER et A Fleur de Pierre ont élaboré en partenariat le programme de la mise en place, du suivi,de l’évaluation et de la pérennisation de ce projet, entre 2008 et 2011.
Aujourd’hui, c’est A Fleur de Pierre qui en continue la gestion, la station de compostage des Cerises a été conçue pour traiter de 15 à 20 tonnes de déchets fermentescibles. Elle accueille actuellement le résultat du tri des foyers du quartier, ainsi que les légumes invendus de 2 boutiques biologiques du centre-ville.
L’équipe d’A Fleur de Pierre se charge de toute l’intendance, c’est-à-dire le ramassage, la mise en bac, les retournements… – mais aussi l’accueil, les visites, les explications, les distributions de seaux… Récolté, retourné, maturé, tamisé, le compost se mérite comme une plante dont on va récolter le fruit… Et grâce à la participation des jardiniers, mais également à tous les habitants du quartier, le projet rencontre un succès encourageant avec une participation aujourd’hui de 50 % de la population concernée.
Bien sûr, il faut aussi un financement pour cela : c’est la communauté de communes qui nous reversent le coût de traitement à la tonne des ordures que nous soustrayons du circuit normal ! Ça ne leur coûte pas plus cher, et au passage, ça crée des emplois, de l’écologie.. et du compost.
Comment ça marche ?
En premier lieu, il faut des « producteurs » : quel drôle de terme pour désigner tous ceux qui vont jouer le jeu et trier leurs déchets de cuisine ! Deux ustensiles pour leur faciliter la tâche :
- des bioseaux : pratiques, légers, joliment décorés, ils recueilleront les épluchures, restes de repas et autres filtres à café, et trouveront leur place dans la cuisine ;
- des biobacs, plus communément appelés conteneurs à ordures, mais ceux-là aussi sont décorés avec les mêmes logos et les mêmes indications, et répartis au pied des immeubles. En outre, pour bien marquer leur lien au Jardin, ils sont abrités sous de jolies pergolas rouges avec des panneaux explicatifs et des plantes grimpantes qui assureront l’ombre et la fraîcheur en été.
Ensuite, vient la gestion du ramassage (on n’ose quand même pas dire « récolte », bien que…). Pour cela, l’équipe d’A Fleur de Pierre sillonne le quartier deux fois par semaine. Les bacs sont amenés au Jardin, vidés, rincés et réinstallés.
Et enfin le traitement au jardin, dans de grands composteurs en bois, isolés thermiquement pour accélérer le processus, et organisés pour les diverses étapes de dégradation et de maturation… Une réserve de broyat complète l’installation. En l’occurrence, il s’agit ici de broyat de branchages, fourni par les élagueurs locaux, et stocké juste à côté.
Voilà pour le fonctionnement, tel qu’il a été conçu et mis en place par et avec GESPER. Mais la vraie question, c’est plutôt :
Est-ce que ça marche ?
Et bien oui ! Magnifiquement oui ! Écologique oui !
On se lançait, il faut bien le dire, dans l’inconnu. Un projet pilote, un appel aux bonnes volontés du quartier, juste avec le succès croissant du Jardin depuis à peine plus d’un an, juste avec l’espoir de sensibiliser vers un tri de plus, pour des locataires d’appartement dont les cuisines, il faut le dire, ne sont pas bien grandes…
La plateforme de compostage Jardin solidaire des Cerises, c’est aujourd’hui :
- 260 familles réunies autour dʼun projet collectif …
- 10 à 12 tonnes par an de déchets de cuisine et de jardin soustraites de la collecte des ordures ménagères et de la cantine du quartier plus 2 à 4 tonnes de déchets verts (le broyat nécessaire pour équilibrer le processus de dégradation des matières azotées)
- 5 à 6 tonnes d’amendement produit pour nourrir les légumes des jardins et les plantes des jardinières
En septembre 2011, sur l’initiative de Philippe BERROD, adjoint au maire de Digne les Bains et vice-président de la communauté de communes, un autre partenariat se met en place avec la ville, l’intercom, le restaurant scolaire Scolarest et A Fleur de Pierre, pour mettre en place un processus de collecte et de compostage pour la cantine centrale qui prépare et sert les repas des écoles primaires et collèges de Digne, et accueille les élèves de 6 parmi les 12 écoles de la commune.
Le bilan quantitatif de l’année 2012 peut se faire en s’appuyant sur une moyenne hebdomadaire, sont ainsi récupérés:
- sur le quartier: 10 093 kilos, soit 194 kilos par an.
- pour le restaurant scolaire, en période scolaire ( soit 35 semaines par an) : 4735 kilos soit 135 kilos par semaine. En période de vacances (soit 17 semaines par an): 452 kilos soit 27 kilos par semaine.
- Le broyat nécessaire au processus: environ 3000 kilos par an.
Au total, et 3 tonnes de structurant carboné sont utilisés et 15 tonnes de déchets fermentescibles sont ainsi détournés du circuit d’ordures ménagères !
Grâce à tous, nous pouvons aujourd’hui reconstruire la cohérence de l’utilisation du compost pour contribuer à la restauration de l’humus.